Page:Fournier - Souvenirs de prison, 1910.djvu/64

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soir, je ne guettais qu’elles dans l’établissement… Le soir en particulier, c’était avec un intérêt toujours nouveau que je les voyais former leurs imposantes cohortes, pour monter, en rangs épais, à l’assaut des fromages épars en nos tiroirs. Touchante image de nos députés aux deux parlements !

Au moment que je quittai la prison, j’achevais justement d’en apprivoiser un couple. Ces admirables orthoptères, comme on dit vulgairement, me reconnaissaient entre tous les prisonniers comme leur bienfaiteur. Aussi dédaignais-je volontiers en leur faveur les rats et souris, qui pourtant ne manquaient point dans l’établissement.


Si j’avais eu des fils, je leur aurais dédié cette première série de Souvenirs, — qui pourrait tout aussi bien s’intituler les Mémoires d’un Affamé, — pour leur apprendre à savoir au besoin, dans la carrière, serrer d’un cran leur ceinture…

En souvenir des coquerelles et des rats, tribus fraternelles et jamais assouvies, je dédierai, de grand cœur, ma seconde série à notre députation ministérielle.