198 GUIRAUD (LE BARON ALEXANDRE).
Ses derniers ouvrages furent un roman pieux : Flavien, dont s'inspira Soumet pour sa tragédie du Gladiateur ; un poème, le Cloître de Villemartin, et un volume assez étrange : Philosophie catholique de l’histoire, dans lequel il remonte aux aventures des Anges. Il mourut le 24 février 1847, à cinquante- neuf ans. L’Académie française l’avait reçu en I826.
LA SŒUR GRISE
J’ai laissé pour toujours la maison paternelle ;
Mes jeunes sœurs pleuraient ; ma pauvre mère aussi,
Oh ! qu’un regret tardif me rendrait criminelle !
Ne suis-je pas heureuse ici ?...
Ne m’abandonne pas, toi qui m’as appelée :
Toi qui mourus pour nous, mon Dieu, je t’appartiens !
Et moi qui console et soutiens,
J’ai besoin d’être consolée.
Ignorante du monde avant de le quitter,
Je ne le hais point ; et peut-être
(Un mourant me l’a dit) j’aurais dû le connaître
Pour ne jamais le regretter.
Quand je me sens reprendre à sa joie éphémère.
Faible encor du dernier adieu.
J’embrasse ta croix, ô mon Dieu !...
Je n’embrasserai plus ma mère.
Souvenirs de bonheur, que voulez-vous de moi ?
Que vous sert de troubler ma retraite profonde ?
Et qu’ai-je à faire avec le monde.
Dont le nom seul, ici, doit me glacer d’effroi ?
Ici la charité remplit mes chastes heures :
Le malheureux bénij ma main qui le défend ;
Je nourris l’orphelin d’espérances meilleures ;
Ta servante, ô mon Dieu, dans ces tristes demeures,
Est l’enfant du vieillard, la mère de l’enfant.