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Page:Fréchette - Poésies choisies, I, 1908.djvu/182

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Jamais deux joueurs, l’un devant l’autre accoudé,
N’avaient encor pâli sur un tel coup de dé...
Terrible incertitude, anxiété profonde,
La voile à l’horizon, c’est la moitié du monde !
Une voile ! une voile ! a-t-on crié là-bas ;
Et, minés par la faim, brisés par les combats,
Déguenillés, transis, vaincus de la souffrance,
Nos soldats ont poussé ce cri sublime : ― France !

Doute affreux ! Incliné sous ses huniers géants,
Un navire doublait la pointe d’Orléans.
De quel côté, mon Dieu, va pencher la balance ?
Maintenant les deux camps haletaient en silence.
Qu’on juge s’ils étaient poignants, accélérés,
Les battements de cœur de ces désespérés !
La pâleur de la mort glaçait tous les visages ;
Les minutes étaient longues comme des âges !