Page:Fréchette - Poésies choisies, I, 1908.djvu/292

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et puis, tous les matins, à l’heure
Où s’ouvrent les marchés, il quittait sa demeure,
Et, d’échoppe en échoppe et d’étal en étal,
Ainsi qu’un bon bourgeois de son pays natal,
Il s’en allait lui-même acheter ses denrées.

Il aimait la rumeur des foules affairées ;
Bonhomme s’il en fût, marchandant et causant,
Il s’arrêtait parfois auprès du paysan,
Et s’informait du prix des blés, de son ménage ;
Il lui parlait moissons, bestiaux, jardinage ;
Chacun le connaissait et chacun écoutait
Ce parleur dont l’accent surtout les déroutait.

Un jour, une vendeuse, accorte et bonne vieille,
Laquelle à ses discours prêtait souvent l’oreille,
L’interpella disant :

                            ― Monsieur, vous jasez bien
Sans doute, et cependant pas en vrai Canadien ;
Pas en Anglais non plus, faut pas dire ça, dame !

― Moi, fait le père Aubry, je suis Français, madame.

― Français ? eh ben,