Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/172

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Et c’est de cette façon qu’entre une heure et trois heures du matin, sont réveillés tous les garçons boulangers de Rouen.

Nous avons dit que les réveille-matin étaient environ au nombre d’une dizaine. Comme il y a dans la ville cent deux boulangers, chacun des industriels bizarres dont nous nous occupons possède en moyenne dix cliens. Après les dix stations, les dix cris de « ohé boulanger ! » les dix réponses de « c’est bien ! on y va ! » les dix individus à gourdin vont se coucher. Ils ont gagné environ un franc dans leur nuit ; — de quoi vivre pendant le jour suivant. Cependant, comme le métier est pénible, comme les affaires ne sont pas toujours prospères, ils s’arrangent de façon à avoir des abonnés. Chaque réveille-matin a sa clientèle spéciale qui lui rapporte, bon an, mal an, 300 fr. environ, y compris les étrennes du jour de l’an et les petits verres vidés sur les comptoirs des marchands de vin.

Le réveille-matin humain vaut mieux que n’importe quelle pendule, car, tandis que l’instrument d’horlogerie ne sonne que pendant un temps déterminé, l’homme frappe avec son bâton jusqu’à ce qu’on lui ait répondu. Il a raison des sommeils les plus lourds et des ronfleurs les plus opiniâtres. Quand le garçon boulanger, fatigué par son