Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/155

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gnards, de coutelas et dé bâtons, parcouraient les rues et montraient au peuple les trophées sanglants de leurs cruautés. Ils promenaient en triomphe au bout de leurs piques des lambeaux de corps humains.

Enfin, arrivé place de Grève, une horreur inexprimable me saisit. La place était couverte d’un peuple immense : la plupart agitaient dans leurs mains des piques, des sabres, des fusils. Dans l’impossibilité d’avancer en voiture jusqu’à l’escalier de l’Hôtel de Ville, on me fit descendre et passer au milieu de cette multitude. « Bon ! disaient-ils, voilà du gibier de guillotine ; c’est le valet de chambre du Tyran ! » À l’aspect de ce danger pressant, jaloux de ne pas déshonorer le sacrifice de ma vie, je demandai à. Dieu de fortifier mon âme. Tout entier à cette pensée, j’entrai dans la salle de la Commune ; ou me plaça auprès du président.

À peu de distance était Santerre. Ce commandant de la milice communale écoutait d’un air capable les plans que des gens à moitié ivres lui développaient pour arrêter les armées étrangères, d’autres proposaient de se lever en masse et de marcher à l’ennemi. Au parquet, place ordinaire du procureur de la Commune, Billaud de Varennes,