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GUIDE DU BON SENS

d’exercer ses ravages, comme à l’avarice succède la prodigalité.

POLYDOXE. — C’est quand ils ont eu des pères avares, justement, que les fils, mis en possession d’un héritage décuplé, peuvent être prodigues.

EUDOXE. — Joli résultat ! Un père doit économiser pour son fils ; mais s’il est avare il ne songe qu’à soi. L’avarice est une des formes les plus détestables, les plus honteuses de l’égoïsme. Les enfants qui voient leur père sacrifier à leur bien-être son propre bien-être, lui seront, espérons-le, reconnaissants de ce sacrifice, et plus tard, espérons-le aussi, ils se sacrifieront à leur tour pour leurs enfants. La vertu d’économie devrait être héréditaire ; il est naturel, il est juste qu’elle le soit.

POLYDOXE. — Qui peut le moins, peut le plus : l’avarice, c’est de l’économie à laquelle on se sacrifie cent pour cent.

EUDOXE. — L’avare ne sacrifie rien du tout puisque c’est donner, c’est dépenser la moindre parcelle de son bien qui lui serait un sacrifice insupportable. C’est pourquoi l’économie peut engendrer l’ingratitude, mais vis-à-vis de l’avarice, l’ingratitude aura toujours un aspect de revanche.

POLYDOXE. — Vous approuvez le fils d’Harpagon de voler son père ?