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GUIDE DU BON SENS

arrive aussi bien qu’elle tienne lieu de cet exploit même.

Sous prétexte que « qui ne risque rien n’a rien », on dénonce le rôle stérile du bon sens, que l’on représente comme l’ennemi du risque : c’est comme si l’on prétendait que l’ennemi du danseur de corde, c’est son balancier.

S’il faut un balancier à l’acrobate, il n’est entreprise si audacieuse qui ne soit à base de bon sens, qui ne repose sur une observation de bon sens, et, pour s’élancer vers le ciel, il faut avoir touché la terre.

D’aucuns voient et mettent le ciel tout entier dans les bulles de savon ; elles sont toute la fantaisie, toute la poésie, mais elles sont d’abord du savon, et sans ce savon, pas de bulles : et comme à l’origine des bulles de savon, il y a le savon, — corps gras, manufacturé, et aux destinations les moins poétiques, — à l’origine de toute fantaisie, de toute poésie, il y a le bon sens, si terre à terre, peu léger et grossier qu’il vous apparaisse…

Le bon sens est inné, c’est-à-dire que, dans toute personne saine, il est comme un sixième sens qui s’ajoute aux cinq autres : la vue, l’ouïe, le goût, l’odorat, le toucher, — et le bon sens. Nombre de fautes contre le bon sens, en peinture, par exemple, en musique, ne se ramènent-elles pas justement à de véritables dépravations de l’ouïe, ou de la vue ? Et bon sens