Page:Franc-Nohain - Les Mémoires de Footit et Chocolat, 1907.djvu/58

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Qu’est devenu Bertrand dit Trompette ? Et qui sait si la publicité de ces lignes ne permettra pas que Chocolat retrouve son camarade Trompette dans quelque industrie notoire, quelque puissant banquier, et, à tout le moins, un millionnaire ?

Car Bertrand, dit Trompette, avait le génie des affaires.

À peine Raphaël avait-il eu le temps de mettre son jambonneau en sûreté, en en avalant précipitamment les dernières bouchées, et à peine avait-il fait mine de repousser d’un poing un peu brusque l’intrus, — Trompette avait d’ailleurs savamment esquivé le coup, — l’intrus qui s’avisait de l’interpeller irrespectueusement, en raillant son visage noir :

— Bien, bien, c’est entendu, dit Trompette : tu es nègre, tu es fort, tu as bon appétit ; maintenant, veux-tu une cigarette ?…

La mauvaise humeur de Chocolat ne pouvait tenir contre une offre si courtoisement faite, et puis, dans cette grande ville où il ne connaissait personne, quelqu’un avec qui causer, quelqu’un de son âge, qui le renseignerait un peu, et qui paraissait assez débrouillard…

Certes, le jeune Trompette était débrouillard, et tout de suite, aux premières bouffées de tabac, il exposait à son camarade émerveillé, le plan d’une collaboration admirable, d’une association extrêmement fructueuse.

Il s’agissait de guetter les voyageurs, les étrangers, à l’arrivée des trains, à la descente des tramways, pour porter leur colis, leur indiquer l’hôtel, les guider dans la ville.