Page:Franc-Nohain - Les Mémoires de Footit et Chocolat, 1907.djvu/8

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court après un insaisissable papillon et j’ai encore dans les oreilles le bruit des acclamations qui le saluèrent…

Mais nous sommes plus exigeants. Il ne nous suffit pas de constater la gloire de nos favoris, nous voulons encore savoir comment ils y parvinrent.

C’est ainsi que naquit l’idée des Mémoires de Footit et de Chocolat.

Ils firent leurs confidences à Franc-Nohain. Franc-Nohain écrivit des vers clownesques, des vers désarticulés comme l’homme-serpent, agiles comme la danseuse de corde, des vers qui sautent en l’air comme des chats et « retombent toujours sur leurs pattes », selon l’expression d’un autre poète, Théophile Gautier. Footit et Chocolat lui dirent tout.

Ils lui contèrent leurs débuts, la misère du pauvre négrillon vendu comme un esclave, tour à tour valet d’écurie, groom, ouvrier dans une usine à Bilbao, les vicissitudes du jeune Footit, né dans les cirques et cherchant sa voie jusqu’au moment où — si blanc ! — il rencontra Chocolat — si noir !

Et Chocolat, avec un sourire ravi, devint le souffre-douleur de Footit !

Mais les gifles que donne le second au premier ne sont pas des gifles méchantes, ce sont des gifles fatales ; il est dans la destinée de Footit de les envoyer et dans celle de Chocolat de les recevoir : voilà tout. Cela ne l’empêche pas de sourire d’ailleurs, ni d’être fier de son bel habit rouge, de ses escarpins vernis, de ses bas de soie, de son gilet blanc et de son « petite châpeau », un melon qu’il plante sur ses yeux et qu’il époussète avec un soin attendri chaque fois qu’il tombe à terre — ce qui lui arrive souvent ; les gifles, n’est-ce pas !…

Au cirque, Chocolat, quand il ne joue pas un travesti, garde ce costume, …et sa couleur naturelle — sale nègre ! a coutume de lui reprocher son compère quand il est à bout de claques et de coups de pied ! — Footit, au contraire, s’enfarine le visage et s’habille en clown classique étincelant de broderies d’or et d’argent.

Par exemple, dans la rue, Footit n’est plus qu’un gentleman blond et trapu, vêtu avec une