Page:Franchère - Relation d'un voyage à la côte du nord-ouest de l'Amérique septentrionale, 1820.djvu/20

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connues. J’entreprendrais inutilement de donner à mes lecteurs une idée tant soit peu correcte du pénible serrement de cœur que j’éprouvai subitement, et du sombre coup-d’œil que je jettai involontairement dans un avenir d’autant plus effroyant pour moi, qu’il ne m’offrait rien que de très-confus et de très-incertain. Une scène nouvelle se déployait devant moi ; mais qu’elle était monotone, et peu propre à diminuer la tristesse dont mon esprit était accablé ! Pour la première fois de ma vie, je me voyais voguant en pleine mer, et n’ayant pour attacher mes regards, et arrêter mon attention que la frêle machine qui me portait entre l’abîme des eaux et l’immensité des cieux. Je demeurai longtems les yeux fixés du côté de cette terre que je ne voyais plus, et que je désespérais presque de revoir jamais : je fis de sérieuses réflexions sur la nature et les conséquences de l’entreprise dans laquelle je m’étais si témérairement embarqué ; et j’avoue que, si dans ce moment on me l’eut proposé, j’y aurais renoncé de tout mon cœur. Il est vrai aussi que l’encombrement du vaisseau ; le grand nombre de gens étrangers ou inconnus avec lesquels je me trouvais ; la manière brutale dont le capitaine et ses subal-