quille impudeur, il demanda à cette jeune fille, qu’il n’avait pas encore vue de la soirée, si elle avait, par hasard, oublié sa promesse.
Elle se leva, sourit, lui prit le bras d’un mouvement dont elle ne put réprimer la nervosité et s’éloigna avec lui. Habitués aux caprices féminins, les jeunes gens se dispersèrent, mais Lanturlut, stupéfait, demeura immobile, ne comprenant pas comment une personne qui vous a juré sur la foi d’un carnet de bal qu’elle danserait avec vous le quatrième quadrille, pouvait, sans explication, disparaître avec un autre cavalier.
Très jolie et très triste, Juliette Brémond acceptait, une rose à la bouche, la situation terrible d’une jeune fille dont la mère a beaucoup trop d’amants pour songer qu’elle a une enfant. Elle gardait un sourire dont on ne pouvait voir le mépris et la lassitude. Ne sentant aucun respect dans les adulations de « sa cour » elle se défendait d’aimer personne, de peur que celui qu’elle choisirait la crût frivole et passât… Elle jouait la comédie d’une énervée et trouvait parfois un subtil et triste plaisir à savoir qu’on « la prenait pour une autre ».
Jacques était son meilleur ami et elle était la meilleure amie de Jacques. Elle devinait qu’il avait compris son triste secret et, lui, savait qu’elle l’avait deviné. Mais, ne sachant comment l’en consoler, il ne lui en parlait point et elle, comprenant cette triste réserve, se taisait longuement. Ils causaient d’ailleurs de tout, en vrais camarades. Souvent Jacques, profitant des libres allures que tolérait chez soi la famille Brémond, apportait à Juliette des livres qu’il lui lisait à haute voix, et ils se communiquaient l’un à l’autre les réflexions de leur jeune et naïf scepticisme. Jamais ni l’un ni l’autre ne faisait la moindre allusion à sa vie personnelle ou à ses ennuis d’intérieur. Ils s’amu-