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Page:Franck - Dictionnaire des sciences philosophiques, 1875.djvu/367

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DAYI

DAYI possédons. Voici l’indication précise de ses ou- vrages philosophiques : ° En arménien seulement : Définition des principes de touies choses; — Fondements de la philosophie; — Apophthegmes des philosophes. ° En arménien et en grec : Commentaire sur l’Introduction de Porphyre; — Commentaire sur les Catégories d’Aristote. ° En grec seulement : Prolégomènes de ce dernier commentaire. ° Enfin des traductions des Catégories, de Vllcrmenéia, un extrait des Analytiques Pre- miers et Derniers, une traduction de la Lettre à Alexandre sur le monde, une traduction du petit traité apocryphe sur les Vices et les Ver- tus, etc. David a fait encore quelques autres ouvrages qui sortent du domaine de la philosophie, mais qu’il est bon de mentionner : ce sont des traités théologiques, et entre autres un sermon pro- noncé dans la chaire d’Athènes, le prjfj.a, où les élèves devaient porter la parole en public à la fin de leur stage de sept années. Ce sermon, écrit d’abord en grec, passe pour un des chefs-d’œuvre de la littérature arménienne. David a fait de plus une grammaire arménienne, dont il reste des fragments, et il commenta pour l’usage de ses compatriotes la grammaire de Denys de Thrace. Des trois caractères que ces divers ouvrages assignent à David, philosophe, théologien, gram- mairien, le premier seul nous intéresse. Ce que l’on sait de la vie de David se réduit à quelques renseignements fort courts. 11 naquit dans un vil- lage du Douroupéran, nommé Herthen, Héréan, ou plus communément Nerken. 11 était, au rap- port de Nersès, cousin germain de Moïse de Kho- rène, l’illustre historien de l’Arménie, et il florissait vers 490, selon le témoignage de Sa- muel, autre chroniqueur arménien. Il mourut vers le commencement du vi e siècle. Le plus récent des auteurs qu’il mentionne lui-même dans ses ouvrages est Ammonius, fils d’Hermias, qui est de cette époque aussi. David est donc contemporain de Proclus, et probablement il fut son condisciple aux leçons de Syrianus et d’Am- monius. David fut un des jeunes gens que saint Sahag et Mesrob, régénérateurs de l’Arménie, envoyèrent aux écoles grecques pour y puiser les lumières qui, rapportées dans le pays, en firent alors une nation indépendante et fort su- périeure à toutes celles dont elle était entourée. David se montra digne de cette confiance, et il suffit de lire ses ouvrages grecs pour se con- vaincre de son mérite. 11 est Grec par le savoir et par la diction, et c’est le plus bel éloge qu’on en puisse faire. Rentré dans sa patrie après de longues et fructueuses études, il paraît s’être consacré uniquement à la science; son nom, du moins, ne paraît point une seule fois dans les agitations politiques dont l’Arménie fut alors le théâtre. Son livre intitulé Définition des principes de toutes choses, imprimé en arménien à Constan- linople en 1731, ne paraît être qu’un recueil de nomenclatures ; et, d’après le fragment cité par M. Neumann, on peut croire que cet ouvrage n’est que le programme d’un cours. En voici le début : « En combien de parties, ou comment une chose est-elle divisée? En deux : substance première et seconde. — En combien la sub- stance seconde est-elle divisée? En deux : sub- stance spéculative, substance active. » Comme on le voit, c’est toujours, sauf le dernier trait, la doctrine péripatéticienne; c’est un simple emprunt aux Catégories. L’ouvrage arménien le plus important et le plus original de David paraît être celui qui a pour titre : Fondements de la philosophie. C’est une réfutation en règle du pyrrhonisme. David réduit à quatre propositions le système des sceptiques, et il les combat l’une après l’autre. Il commence par prouver que la connaissance est possible et que la philosophie existe. David v cite fréquemment les philosophes de la Grèce" et surtout Platon, dont il adopte en général le système. Enfin, dans son Recueil des apophthegmes des anciens philosophes, M. Neumann assure avoir trouvé quelques apophthegmes nouveaux qui ne se rencontrent pas dans les auteurs grecs. De plus, M. Neumann, qui a étudié sur les textes originaux tous ces ouvrages, n’hésite point à dire que David doit prendre place parmi les plus célèbres néo-platoniciens du v e siècle, et que désormais nul historien de la philosophie ne peut plus passer sous silence « le très-grand et invin- cible philosophe de la nation arménienne. » Ce sont là en effet les épithètes un peu fastueuses et toutes scolastiques dont l’admiration nationale a entouré le nom de David. Dans son Commentaire grec sur V Intro- duction de Porphyre, il suit pas à pas le com- mentaire d’ Ammonius, traitant les mêmes points, dans le même ordre, donnant les mêmes solu- tions, et empruntant parfois des expressions iden- tiques. Le Commentaire sur les Catégories se divise en deux parties fort distinctes, les prolégomènes et le commentaire lui-même. Les prolégomènes sont plus étendus que ceux d’Ammonius et même de Simplicius. C’est une sorte d’introduction générale aux ouvrages d’Aristote, divisée en dix points. Le second, où il traite de la classification des œuvres du philosophe, contient des indi- cations précieuses qui peuvent compléter les catalogues que nous avons. Ainsi, il vient joindre son témoignage à celui de l’anonyme de Ménage, qui était unique jusque-là, pour attester qu’à cette époque on possédait un livre d’Aristote en soixante-douze sections, intitulé Mélanges. Il nous apprend, en outre, que le fameux Recueil des Constitutions était rangé par ordre alpha- bétique; qu’au v e siècle la Politique était par- tagée en livres comme elle l’est aujourd’hui, et enfin que ce furent les commentateurs attiques d’Alexandrie qui décidèrent parmi les diverses éditions des Analytiques déposées dans les bi- bliothèques, quelle était la véritable. On pourrait encore, avec quelque attention, découvrir dans les prolégomènes de David bien d’autres indi- cations précieuses pour l’histoire de la philo- sophie. Quant au commentaire lui-même, il joint à une élégance de style fort remarquable une exactitude qui traite scrupuleusement, si ce n’est avec originalité, tous les points de la dis- cussion; et c’est un complément très-utile des travaux d’Ammonius et de Simplicius. Les œuvres de David, indépendamment de leur valeur propre, en ont une autre toute relative et qui n’est point à dédaigner. Elles sont, dans l’histoire de la philosophie, un des anneaux de la longue chaîne intellectuelle qui unit^ l’an- tiquité aux temps modernes. David représente le mouvement philosophique de la Grèce se pro- pageant en Arménie, et contribuant pour sa part à celui que développèrent les Arabes un peu plus tard. Retrouver dans un monument authen- tique l’état des études philosophiques en Arménie à la fin du v e siècle, c’est presque, ce semble, conquérir une nouvelle province à l’histoire de la philosophie. L’Arménie, jusqu’à présent, n’y figurait point à ce titre, et pourtant elle méri- tait d’y figurer. Elle vivait à cette époque de la