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Page:Frehel - Le Précurseur.pdf/194

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— Alors ? interrogea la visiteuse.

— Alors, madame, répondit Jacquemine, nous ne travaillons qu’en vue d’une minorité. Nous n’avons pas de programme. La vie que nous menons fait à elle seule la sélection indispensable. Nous ne nous agitons pour aucune propagande. À quoi servirait-elle, si un besoin complet d’affranchissement n’avait pas germé dans les âmes ?

La doctoresse eut un sourire imperceptiblement incrédule.

— Vous vivez une utopie, dit-elle.

— Oui, c’est l’enseignement sans paroles, répondit Jacquemine, rendant à l’incrédule un beau sourire d’espérance.

— Cependant les conférences, les journaux, la publicité ! Tous ces moyens de propagande ont bien leur utilité. Vous vous feriez connaître…

— Il vaut mieux qu’on nous découvre. Non, croyez-moi, si Socrate n’avait fait que prononcer l’Apologie…

Un silence tomba entre elles, mesurant la distance qui les séparait. Tout en conversant, les