Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/111

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d’un rêve et, lorsqu’on se souvient le matin du rêve de la nuit, comment retrouverait-on l’excitation qui avait peut-être agi pendant le sommeil ? J’ai réussi une fois, grâce naturellement à des circonstances particulières, à constater après coup une excitation sonore de ce genre. Je me suis réveillé un matin dans une station d’altitude du Tyrol avec la conviction d’avoir rêvé que le pape était mort. Je cherchais à m’expliquer ce rêve, lorsque ma femme me demanda : « As-tu entendu au petit jour la formidable sonnerie de cloches à laquelle se sont livrées toutes les églises et chapelles ? » Non, je n’avais rien entendu, car je dors d’un sommeil assez profond, mais cette communication m’a permis de comprendre mon rêve. Quelle est la fréquence de ces excitations qui induisent le dormeur à rêver, sans qu’il obtienne plus tard la moindre information à leur sujet ? Elle est peut-être grande, et peut-être non. Lorsque l’excitation ne peut plus être prouvée, il est impossible d’en avoir la moindre idée. Et, d’ailleurs, nous n’avons pas à nous attarder à la discussion de la valeur des excitations extérieures, au point de vue du trouble qu’elles apportent au sommeil, puisque nous savons qu’elles sont susceptibles de nous expliquer seulement une petite fraction du rêve, et non toute la réaction qui constitue le rêve.

Mais ce n’est pas là une raison d’abandonner toute cette théorie, qui est d’ailleurs susceptible de développement. Peu importe, au fond, la cause qui trouble le sommeil et incite aux rêves. Lorsque cette cause ne réside pas dans une excitation sensorielle venant du dehors, il peut s’agir d’une excitation cœnesthétique, provenant des organes internes. Cette dernière supposition paraît très probable et répond à la conception populaire concernant la production des rêves. Les rêves proviennent de l’estomac, entendrez-vous dire souvent. Mais, ici encore, il peut malheureusement arriver qu’une excitation cœnesthétique qui avait agi pendant la nuit ne laisse aucune trace le matin et devienne de ce fait indémontrable. Nous ne voulons cependant pas négliger les bonnes et nombreuses expériences qui plaident en faveur du rattachement des rêves aux excitations internes. C’est en général un fait incontestable que l’état des organes internes est susceptible d’influer sur les rêves. Les rapports qui