Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/233

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que l’éducation supprime avec énergie, au fur et à mesure de leur manifestation, toutes les tendances sexuelles de l’enfant. Cette suppression passe, pour ainsi dire, de la pratique dans la théorie, les adultes s’efforçant de fermer les yeux sur une partie des manifestations sexuelles de l’enfant et de dépouiller, à l’aide d’une certaine interprétation, l’autre partie de ces manifestations de leur nature sexuelle : ceci fait, rien n’est plus facile que de nier le tout. Et ces négateurs sont souvent les mêmes gens qui, dans la nursery, sévissent contre tous les débordements sexuels des enfants ; ce qui ne les empêche pas, une fois devant leur table de travail, de défendre la pureté sexuelle des enfants. Toutes les fois que les enfants sont abandonnés à eux-mêmes ou subissent des influences démoralisantes, on observe des manifestations souvent très prononcées de perversité sexuelle. Sans doute, les grandes personnes ont-elles raison de ne pas prendre trop au sérieux ces « enfantillages » et ces « amusements », l’enfant ne devant compte de ses actes ni au tribunal des mœurs ni à celui des lois ; il n’en reste pas moins que ces choses existent, qu’elles ont leur importance, autant comme symptômes d’une constitution congénitale que comme antécédents et facteurs d’orientation de l’évolution ultérieure et qu’enfin, elles nous renseignent sur la vie sexuelle de l’enfant et, avec elle, sur la vie sexuelle humaine en général. C’est ainsi que si nous retrouvons tous ces désirs pervers derrière nos rêves déformés, cela signifie seulement que dans ce domaine encore le rêve a accompli une régression vers l’état infantile.

Parmi ces désirs défendus, on doit accorder une mention particulière aux désirs incestueux, c’est-à-dire aux désirs sexuels dirigés sur les parents, sur les frères et sœurs. Vous savez l’aversion que les sociétés humaines éprouvent ou, tout au moins, affichent à l’égard de l’inceste et quelle force de contrainte présentent les défenses y relatives. On a fait des efforts inouïs pour expliquer cette phobie de l’inceste. Les uns ont vu dans la défense de l’inceste une représentation psychique de la sélection naturelle, les relations sexuelles entre proches parents devant avoir pour effet une dégénérescence des caractères sociaux, d’autres ont prétendu que la vie en commun