Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/304

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attention. Tant que la malade accomplissait l’action obsessionnelle, elle ignorait que ce faisant elle se reportait à l’événement en question. Le lien existant entre l’action et l’événement lui échappait ; elle disait la vérité, lorsqu’elle affirmait qu’elle ignorait les mobiles qui la font agir. Et voilà que, sous l’influence du traitement, elle eut un jour la révélation de ce lien dont elle devient capable de nous faire part. Mais elle ignorait toujours l’intention au service de laquelle elle accomplissait son action obsessionnelle : il s’agissait notamment pour elle de corriger un pénible événement du passé et d’élever le mari qu’elle aimait à un niveau supérieur. Ce n’est qu’après un travail long et pénible qu’elle a fini par comprendre et convenir que ce motif-là pouvait bien être la seule cause déterminante de son action obsessionnelle.

C’est du rapport avec la scène qui a suivi l’infortunée nuit de noces et des mobiles de la malade inspirés par la tendresse, que nous déduisons ce que nous avons appelé le « sens » de l’action obsessionnelle. Mais pendant qu’elle exécutait celle-ci, ce sens lui était inconnu aussi bien en ce qui concerne l’origine de l’action que son but. Des processus psychiques agissaient donc en elle, processus dont l’action obsessionnelle était le produit. Elle percevait bien ce produit par son organisation psychique normale, mais aucune de ses conditions psychiques n’était parvenue à sa connaissance consciente. Elle se comportait exactement comme cet hypnotisé auquel Bernheim avait ordonné d’ouvrir un parapluie dans la salle de démonstrations cinq minutes après son réveil et qui, une fois réveillé, exécuta cet ordre sans pouvoir motiver son acte. C’est à des situations de ce genre que nous pensons lorsque nous parlons de processus psychiques inconscients. Nous défions n’importe qui de rendre compte de cette situation d’une manière scientifique plus correcte et, quand ce sera fait, nous renoncerons volontiers à l’hypothèse des processus psychiques inconscients. D’ici là, nous la maintiendrons et nous accueillerons avec un haussement d’épaules résigné l’objection d’après laquelle l’inconscient n’aurait aucune réalité au sens scientifique du mot, qu’il ne serait qu’un pis aller, une façon de parler. Objection inconcevable dans le cas qui nous occupe, puisque cet inconscient auquel on veut contester