Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/317

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s’empare des difficultés et invraisemblances que la pensée normale, mais mal informée, découvre dans les théories analytiques. Nous entendons alors de la bouche de ce seul malade toutes les critiques et objections dont le chœur nous assaille dans la littérature scientifique, comme, d’autre part, les voix qui nous viennent du dehors ne nous apportent rien que nous n’ayons déjà entendu de la bouche de nos malades. Une vraie tempête dans un verre d’eau. Mais le patient souffre bien qu’on lui parle ; il veut bien qu’on le renseigne, l’instruise, le réfute, qu’on lui indique la littérature où il puisse s’informer. Il est tout disposé à devenir partisan de la psychanalyse, mais à condition que l’analyse l’épargne, lui personnellement. Nous sentons dans cette curiosité une résistance, le désir de nous détourner de notre tâche spéciale. Aussi la repoussons-nous. Chez les névrosés obsessionnels, la résistance se sert d’une tactique spéciale. Le malade nous laisse sans opposition poursuivre notre analyse qui peut ainsi se flatter de répandre une lumière de plus en plus vive sur les mystères du cas morbide dont on s’occupe ; mais finalement on est tout étonné de constater qu’aucun progrès pratique, aucune atténuation des symptômes ne correspondent à cette élucidation. Nous pouvons alors découvrir que la résistance s’est réfugiée dans le doute qui fait partie de la névrose obsessionnelle et que c’est de cette position retirée qu’elle dirige contre nous sa pointe. Le malade s’est dit à peu près ceci : « Tout cela est très beau et fort intéressant. Je ne demande pas mieux que de continuer. Cela changerait bien ma maladie, si c’était vrai. Mais je ne crois pas du tout que ce soit vrai et, tant que je n’y crois pas, cela ne touche en rien à ma maladie. » Cette situation peut durer longtemps, jusqu’à ce qu’on vienne attaquer la résistance dans son refuge même, et alors commence la lutte décisive.

Les résistances intellectuelles ne sont pas les plus graves ; on en vient toujours à bout. Mais, tout en restant dans le cadre de l’analyse, la malade s’entend aussi à susciter des résistances contre lesquelles la lutte est excessivement difficile. Au lieu de se souvenir, il reproduit des attitudes et des sentiments de sa vie qui, moyennant le « transfert », se laissent utiliser comme moyens