Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/454

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possibilité de transformation de la libido des objets en libido du moi, donc la nécessité de compter avec une libido du moi, nous est apparue comme la seule explication vraisemblable de l’énigme des névroses dites narcissiques, comme, par exemple, la démence précoce, ainsi que des ressemblances et des différences qui existent entre celle-ci d’un côté, l’hystérie et l’obsession de l’autre. Nous appliquons maintenant à la maladie, au sommeil et à l’état amoureux ce dont nous avons trouvé ailleurs une confirmation irréfutable. Nous devons poursuivre ces applications, afin de voir jusqu’où elles nous mèneront. La seule proposition qui ne découle pas directement de notre expérience analytique, est que la libido reste la libido, qu’elle s’applique à des objets ou au propre moi du sujet, et qu’elle ne se transforme jamais en intérêt égoïste ; on peut en dire autant de ce dernier. Mais cette proposition équivaut à la distinction, déjà soumise par nous à une appréciation critique, entre les tendances sexuelles et les tendances du moi, distinction que, pour des raisons heuristiques, nous sommes décidés à maintenir, jusqu’à sa réfutation possible.

Votre deuxième objection est également justifiée, mais elle est engagée dans une fausse direction. Sans doute, le retour vers le moi de la libido détachée des objets n’est-il pas directement pathogène ; ne voyons-nous pas ce phénomène se produire chaque fois avant le sommeil, et suivre une marche inverse après le réveil ? L’animalcule protoplasmique rentre ses prolongements, pour les émettre de nouveau à la première occasion. Mais c’est tout autre chose lorsqu’un processus déterminé, très énergique, force la libido à se détacher des objets. La libido devenue narcissique ne peut plus alors retrouver le chemin qui conduit aux objets, et c’est cette diminution de la mobilité de la libido qui devient pathogène. On dirait qu’au-delà d’une certaine mesure l’accumulation de la libido ne peut être supportée. Il est permis de supposer que si la libido vient s’attacher à des objets, c’est parce que le moi y voit un moyen d’éviter les effets morbides que produirait une libido accumulée chez lui à l’excès. S’il entrait dans nos intentions de nous occuper plus en détail de la démence précoce,