Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/474

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Quelle en est la raison ? Cela ne peut venir d’un manque d’intelligence ; nous supposons sans doute chez nos malades un certain niveau intellectuel, mais ce niveau existe certainement chez les paranoïaques, si habiles à édifier des combinaisons ingénieuses. Nous ne pouvons pas davantage incriminer l’absence d’un autre facteur quelconque. À l’encontre des paranoïaques, les mélancoliques ont conscience d’être malades et de souffrir gravement, mais cela ne les rend pas plus accessibles au traitement psychanalytique. Nous sommes là en présence d’un fait que nous ne comprenons pas, de sorte que nous sommes tentés de nous demander si nous avons bien compris toutes les conditions du succès que nous avons obtenu dans les autres névroses.

Si nous nous en tenons à nos hystériques et à nos malades atteints de névrose d’angoisse, nous ne tardons pas à voir se présenter un autre fait auquel nous n’étions nullement préparés. Nous nous apercevons notamment, au bout de très peu de temps, que ces malades se comportent envers nous d’une façon tout à fait singulière. Nous croyions avoir passé en revue tous les facteurs dont il convient de tenir compte au cours du traitement, avoir rendu notre situation par rapport au patient aussi claire et évidente qu’un exemple de calcul ; et voilà que nous constatons qu’il s’est glissé dans le calcul un élément dont il n’a pas été tenu compte. Cet élément inattendu étant susceptible de se présenter sous des formes multiples, je commencerai par vous en décrire les aspects les plus fréquents et le plus facilement intelligibles.

Nous constatons notamment que le malade, qui ne devrait pas chercher autre chose qu’une issue à ses conflits douloureux, manifeste un intérêt particulier pour la personne de son médecin. Tout ce qui concerne celui-ci lui semble avoir plus d’importance que ses propres affaires et détourne son attention de sa maladie. Aussi les rapports qui s’établissent entre le médecin et le malade sont-ils pendant quelque temps très agréables ; le malade se montre particulièrement prévenant, s’applique à témoigner sa reconnaissance toutes les fois qu’il le peut et révèle des finesses et des qualités de son caractère que nous n’aurions peut-être pas cherchées. Il finit par inspirer une opinion favorable au médecin, et celui-ci