Page:Freud - Introduction à la psychanalyse (trad. Jankélévitch), 1923.djvu/493

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

C’est ainsi que l’étude du rêve nous ouvre l’accès le plus commode à la connaissance de l’inconscient refoulé dont fait partie la libido soustraite à la domination du moi.

Les rêves des névrosés ne diffèrent cependant sur aucun point essentiel de ceux des sujets normaux ; et non seulement ils n’en diffèrent pas, mais encore il est difficile de distinguer les uns des autres. Il serait absurde de vouloir donner des rêves des sujets nerveux une explication qui ne fût pas valable pour les rêves des sujets normaux. Aussi devons-nous dire que la différence qui existe entre la névrose et la santé ne porte que sur la vie éveillée dans l’un et dans l’autre de ces états, et disparaît dans les rêves nocturnes. Nous sommes obligés d’appliquer et d’étendre à l’homme normal une foule de données qui se laissent déduire des rapports entre les rêves et les symptômes des névrosés. Nous devons reconnaître que l’homme sain possède, lui aussi, dans sa vie psychique, ce qui rend possible la formation de rêves et celle de symptômes, et nous devons en tirer la conclusion qu’il se livre, lui aussi, à des refoulements, qu’il dépense un certain effort pour les maintenir, que son système inconscient recèle des désirs réprimés, encore pourvus d’énergie, et qu’une partie de sa libido est soustraite à la maîtrise de son moi. L’homme sain est donc un névrosé en puissance, mais le rêve semble le seul symptôme qu’il soit capable de former. Ce n’est là toutefois qu’une apparence, car en soumettant la vie éveillée de l’homme normal à un examen plus pénétrant, on découvre que sa vie soi-disant saine est pénétrée d’une foule de symptômes, insignifiants, il est vrai, et de peu d’importance pratique.

La différence entre la santé nerveuse et la névrose n’est donc qu’une différence portant sur la vie pratique et dépend du degré de jouissance et d’activité dont la personne est encore capable. Elle se réduit probablement aux proportions relatives qui existent entre les quantités d’énergie restées libres et celles qui se trouvent immobilisées par suite du refoulement. Il s’agit donc d’une différence d’ordre quantitatif et non qualitatif. Je n’ai pas besoin de vous rappeler que cette manière de voir fournit une base théorique à la conviction que nous avons exprimée, à savoir que les névroses sont curables en