Page:Freud - Psychopathologie de la vie quotidienne, trad. Jankélévitch, 1922.djvu/111

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qu’il s’est aperçu de son lapsus (p. 50). On comprendra son émotion, si l’on songe de combien près le mot « Altesl » ressemble à l’injure : « Alter Esel[1] ». Le manque de respect pour les plus âgés (chez les enfants, pour le père) entraîne de graves châtiments internes.

J’espère que les lecteurs ne refuseront pas toute valeur aux distinctions que j’établis en ce qui concerne l’interprétation des lapsus, bien que ces distinctions ne soient pas susceptibles de démonstration rigoureuse, et qu’ils voudront bien tenir compte des exemples que j’ai moi-même réunis et analysés. Et si je persiste à espérer que les cas de lapsus, même les plus simples. en apparence, pourront un jour être ramenés à des troubles ayant leur source dans une idée à moitié réprimée, extérieure à la phrase ou au discours qu’on prononce, j’y suis encouragé par une remarque intéressante de Meringer lui-même. Il est singulier, dit cet auteur, que personne ne veuille reconnaître avoir commis un lapsus. Il est des gens très raisonnables et honnêtes qui sont offensés, lorsqu’on leur dit qu’ils se sont rendus coupables d’une erreur de ce genre. Je ne crois pas que ce fait puisse être généralisé dans la mesure où le fait Meringer, en employant le mot « personne ». Mais la trace d’émotion qu’on suscite en prouvant à quelqu’un qu’il a commis un lapsus et qui est manifestement très voisine de la honte, a sa signification. Elle est de la même nature que la contrariété que nous éprouvons, lorsque nous ne pouvons retrouver un nom oublié, et que l’étonnement que nous cause la persistance d’un souvenir insignifiant en apparence : dans tous ces cas le trouble est dû très vraisemblablement à l’intervention d’un motif inconscient.

La déformation de noms exprime le mépris, lorsqu’elle est intentionnelle, et on devrait lui attribuer la même signification dans toute une série de cas où

  1. « Vieil âne. » N. d. T.