Page:Freud - Psychopathologie de la vie quotidienne, trad. Jankélévitch, 1922.djvu/189

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jeune étudiant vient de s’affirmer comme un de mes élèves par un intéressant travail intitulé : L’artiste. Essai d’une psychologie sexuelle. Lorsque ce travail eut paru en librairie quinze mois plus tard, mon malade m’affirma qu’il se souvenait sûrement avoir déjà lu quelque part, dans un catalogue de librairie peut-être, l’annonce de ce travail, avant même que je lui en aie parlé la première fois (peut-être un mois, peut-être six mois avant cette époque). Déjà alors il aurait pensé à cette notice et constaté, en outre, que l’auteur a modifié le titre de son travail qui s’appelle maintenant Contributions à une psychologie sexuelle, au lieu de Essai d’une psychologie sexuelle. M’étant renseigné auprès de l’auteur et ayant comparé toutes les dates, j’ai bien été obligé de conclure que mon malade voulait se rappeler une chose impossible. Aucune notice annonçant ce travail n’avait paru avant son impression ; en tous cas, il n’en a été question nulle part quinze mois à l’avance. J’allais renoncer à l’interprétation de cette illusion de la mémoire, lorsque le malade vint me faire part d’une autre illusion du même genre. Il croyait avoir aperçu tout récemment, dans la vitrine d’une librairie, un ouvrage sur l’Agoraphobie qu’il voudrait acheter, mais qu’il ne trouvait dans aucun catalogue. Je pus alors lui expliquer pourquoi ses recherches devaient rester vaines. L’ouvrage sur l’Agoraphobie était né dans son imagination, à titre de projet inconscient, et c’est lui-même qui devait l’écrire. Son ambition de rivaliser avec le jeune homme dont j’ai parlé plus haut et d’écrire un travail scientifique susceptible de l’introduire dans le cercle de mes élèves, l’a conduit aussi bien à la première qu’à la seconde de ces illusions de la mémoire. Il se rappela alors que la notice de librairie qui l’avait conduit à cette fausse reconnaissance se rapportait à un ouvrage intitulé : « Genèse, loi de la reproduction. » Quant à la modification du titre dont il a parlé, c’est moi qui lui en ai suggéré l’idée, puisque je me suis rappelé avoir commis