Page:Freud - Psychopathologie de la vie quotidienne, trad. Jankélévitch, 1922.djvu/273

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mise tel ou tel trait de son caractère. C’est la plasticité du langage qui rend possible la détermination de l’erreur et impose des limites à celle-ci.

Pour ne pas parler uniquement de mes erreurs personnelles, je vais citer encore quelques exemples qui auraient pu tout aussi bien figurer sous la rubrique des lapsus de la parole ou des méprises, ce qui n’a d’ailleurs aucune importance, étant donné l’équivalence qui existe entre toutes ces variétés d’actions manquées.

a) J’avais interdit à un de mes malades, qui était lui-même décidé à rompre avec sa maîtresse, de communiquer téléphoniquement avec celle-ci, chaque conversation ne pouvant que rendre difficile la lutte contre l’habitude qu’il avait contractée à son égard. Je lui conseille de lui faire connaître sa dernière décision par lettre, malgré la difficulté de lui faire parvenir celle-ci. A une heure de l’après-midi, il vient me voir pour m’annoncer qu’il a trouvé un moyen de tourner cette difficulté, et il me demande en passant s’il peut invoquer mon autorité médicale. Vers deux heures, occupé à rédiger la lettre de rupture, il s’interrompt brusquement et dit à sa mère qui se trouvait à côté de lui : « Et dire que j’ai oublié de demander au professeur si je dois le nommer. » Il court aussitôt au téléphone, demande la communication et téléphone : « Puis-je, s’il vous plaît, voir M. le professeur après le dîner ? » « Es-tu fou, Adolphe ? » lui répond, sur un ton d’étonnement, la voix même que, sur mon conseil, il ne devait plus entendre. Il s’était tout simplement « trompé » et avait demandé le numéro de téléphone de sa maîtresse, au lieu du mien.

b) Une jeune femme se propose de faire une visite à une de ses amies récemment mariée, habitant la Habsburgerstrasse. Elle parle de cette visite pendant le repas, mais dit par erreur qu’elle doit aller Babenbergerstrasse. D’autres personnes se trouvant à table attirent en riant son attention sur l’erreur (ou, si l’on