Page:Freud - Psychopathologie de la vie quotidienne, trad. Jankélévitch, 1922.djvu/42

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toute proche et affirme qu’il y existe, en plus des deux auberges connues, une troisième à laquelle se rattache pour lui un certain souvenir et dont il me dira le nom dans un instant. Je conteste l’existence de cette troisième auberge et invoque, à l’appui de mes dires, le fait que j’ai passé dans l’endroit en question sept étés consécutifs et que je le connais, par conséquent, mieux que mon interlocuteur. Excité par la contradiction, celui-ci finit par se rappeler le nom. L’auberge s’appelle Der Hochwartner. Je suis obligé de céder et d’avouer que j’ai habité pendant sept étés consécutifs dans le voisinage immédiat de cette auberge dont je niais tout à l’heure l’existence. Mais pourquoi ai-je oublié la chose et le nom ? Je crois que c’est parce que ce nom ressemble beaucoup à celui d’un de mes confrères en spécialité habitant Vienne ; il se rapporte donc chez moi à un complexe « professionnel ».

c) Une autre fois, étant sur le point de prendre un billet à la gare de Reichenhall, je ne puis me souvenir du nom de la grande gare la plus proche, bien que je l’aie souvent traversée. Je suis obligé de me mettre très sérieusement à le chercher sur le plan. Cette gare s’appelle Rosenheim. Je vois aussitôt en vertu de quelle association son nom m’avait échappé. Une heure auparavant, j’ai fait une visite à ma sœur dans sa villégiature près de Reichenhall ; ma sœur s’appelle Rosa ; l’endroit qu’elle habitait était donc pour moi un Rosenheim (séjour de Rose). C’est ainsi que dans ce cas l’oubli a été déterminé par un « complexe familial ».

d) Je suis à même de prouver cette action vraiment dévastatrice du « complexe familial » sur toute une série d’exemples.

Un jour se présente à ma consultation un jeune homme. C’est le frère le plus jeune d’une de mes patientes ; je l’ai déjà vu un nombre incalculable de fois et j’ai l’habitude de l’appeler par son prénom. Lorsque j’ai voulu ensuite parler de sa visite, je fus