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Méliador

« Je vous pri que vous aprendrés [1]
« Qui je sui, ne comment je jouste,
« Car il couvient que trop vous couste
3890 « S’a moi vous metés en bataille. »
Dist Melyador : « Ne me caille
« Qui vous soiiés, sachiés de voir ;
« Mais faire vodrai mon devoir
« Enviers vous, comment qu’il m’en prende,
3895 « Et se je puis a vous aprendre
« Aucun bon tour, j’en vaudrai mieus.
« Ja de moi ne serés eskieus
« Pour aventure qui m’aviegne. »
A ces mos n’i a nul ne tiegne
3900 Sa lance a son droit toute preste,
Et qui en l’arrest ne l’arreste.
A ces mos Agamar s’atourne,
Qui pour jouster trop bien s’atourne, f. 30 a
Car il a pris en grant despit
3905 Ce que Melyador ot dit :
Par dessus ses estriers s’estent.
Li bleus chevaliers, qui l’atent,
S’appareille pour faire empainte
Dou glave qui fu en bleu tainte.
3910 Cevaus brochent des esporons.
Assés tost bonne jouste orons,
Car point espargnier ne se voellent.
Moult tres fierement se recueillent
Des lances as bons fers agus,
3915 Et se fierent sus les escus
Plainnement et en abandon.
Aghamar feri de randon
Le damoisiel Melyador,
Sus sa targe au biel soleil d’or ;
3920 Mais de noient ne l’empira,
Car li mestres qui l’atira
Le fist si bonne et si certainne

  1. 3887 aprendrés, B aprendés.