Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/148

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dominante et jamais soumise, inégale, indisciplinable, impitoyable, venant à son heure et s’en allant comme elle était venue, ressemblait, à s’y méprendre, à ce que les poëtes nomment l’inspiration et personnifient dans la Muse. Elle était impérieuse et infidèle, deux traits saillants qui me la firent prendre pour l’inspiratrice ordinaire des esprits vraiment doués, jusqu’au jour où, plus tard, je compris que la visiteuse à qui je dus tant de joies d’abord et puis tant de mécomptes n’avait rien des caractères de la Muse, sinon beaucoup d’inconstance et de cruauté.

Cette double vie de fièvre de cœur, de fièvre d’esprit, faisait de moi un être fort équivoque. Je le sentis. Il y avait là plus d’un danger auquel je voulus parer, et je crus le moment venu de me débarrasser d’un secret sans valeur, pour en sauver un plus précieux.

« C’est singulier,… me dit Olivier ; où cela te mènera-t-il ?… Au fait, tu as raison, si cette occupation t’amuse. »

Courte réponse qui contenait pas mal de dédain et peut-être beaucoup d’étonnement.

Au milieu de ces diversions, mes études allaient comme elles pouvaient. Une grâce d’état continuait de me donner des succès que je dédaignais en les