Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/18

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plètement résigné à la défaite. Mais il y a tant de nuances dans la sincérité la plus loyale ! il y a tant de manières de dire la vérité sans la dire tout entière ! L’absolu détachement des choses n’admettrait-il aucun regard jeté de loin sur les choses qu’on désavoue ? Et quel est le cœur assez sûr de lui pour répondre qu’il ne se glissera jamais un regret entre la résignation, qui dépend de nous, et l’oubli, qui ne peut nous venir que du temps ?

Quoi qu’il en soit de ce jugement porté sur un passé qui ne s’accordait pas très-bien avec sa vie présente, à l’époque dont je parle du moins, il était arrivé à ce degré de démission de lui-même et d’obscurité qui semblait lui donner tout à fait raison. Aussi ne fais-je que le prendre au mot en le traitant à peu près comme un inconnu. Il était devenu, d’après ses propres termes, si peu quelqu’un, et tant d’autres que lui pourraient à la rigueur se reconnaître dans ces pages, que je ne vois pas la moindre indiscrétion à publier de son vivant le portrait d’un homme dont la physionomie se prête à tant de ressemblances. Si quelque chose le distingue un peu du grand nombre de ceux qui volontiers retrouveraient en lui leur propre image, c’est que, par une exception qui, je le crois, ne fera