Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/273

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pliaient ou m’ordonnaient de me taire, elle m’eût dit une seule chose que je savais trop bien : c’est que les confidences étaient faites, et que je me conduisais comme un lâche ! Mais elle demeurait immobile, sans geste, sans voix, les lèvres fermées, les yeux rivés sur moi, les joues en pleurs, sublime d’angoisse, de douleur et de fermeté.

« Madeleine ! m’écriai-je en tombant à ses genoux ; Madeleine, pardonnez-moi… »

Mais elle se leva à son tour, par un mouvement de femme indignée que je n’oublierai jamais ; puis elle fit quelques pas vers sa chambre ; et comme je me traînais vers elle, la suivant, cherchant un mot qui ne l’offensât plus, un dernier adieu pour lui dire au moins qu’elle était un ange de prévoyance et de bonté, pour la remercier de m’avoir épargné des folies, — avec une expression plus accablante encore de pitié, d’indulgence et d’autorité, la main levée comme si de loin elle eût voulu la poser sur mes lèvres, elle fit encore le geste de m’imposer silence et disparut.