Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/287

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« Vous m’avez guéri, Madeleine, je ne vous aime plus. »

Elle s’arrêta court, devint horriblement pâle, et hésita comme effrayée par une méchanceté qui la blessait jusqu’au fonds de l’âme.

« Oh ! rassurez-vous, lui dis-je, le jour où cela serait…

— Le jour où cela serait ?… » reprit-elle, et la voix lui manquant, elle fondit en larmes.

Le lendemain pourtant, elle revint. Je la vis descendre de sa voiture si changée, si abattue, que j’en fus épouvanté.

« Qu’avez-vous ? » lui dis-je en courant à sa rencontre, tant j’avais peur qu’elle ne défaillît au premier pas.

Elle se remit un peu, grâce à de prodigieux efforts dont je ne fus pas dupe, et me répondit seulement :

« Je suis bien fatiguée. »

Alors je fus pris d’un remords horrible.

« Je suis un misérable sans cœur et sans honnêteté ! m’écriai-je. Je n’ai pas su me sauver ; vous venez à moi, et je vous perds ! Madeleine, je n’ai plus besoin de vous, je ne veux plus de secours, je ne veux plus rien… Je ne veux pas d’une assistance achetée si cher et d’une amitié que j’ai