Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/328

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sant des chevaux. M. d’Orsel fredonnait en souvenir de la pièce. Julie m’examinait à la dérobée, puis se collait le visage aux vitres et regardait les rues. Madeleine, à demi renversée, comme elle l’eût été sur un lit de repos, froissait par un geste nerveux un énorme bouquet de violettes qui toute la soirée m’avait enivré. Je voyais l’éclat bizarre et fiévreux de ses yeux fixes. J’étais dans un grand trouble, et je sentais distinctement qu’il y avait d’elle à moi je ne sais quoi de très-grave, comme un débat décisif.

Elle descendit la dernière, et je tenais encore sa main que déjà M. d’Orsel et Julie montaient devant nous le perron de l’hôtel. Elle fit un pas pour les suivre, et laissa tomber son bouquet. Je feignis de ne pas m’en apercevoir.

« Mon bouquet, je vous prie ? » me dit-elle, comme si elle eût parlé à son valet de pied.

Je le lui tendis sans dire un seul mot ; j’aurais sangloté. Elle le prit, le porta rapidement à ses lèvres, y mordit avec fureur, comme si elle eût voulu le mettre en pièces.

« Vous me martyrisez et vous me déchirez, » me dit-elle tout bas avec un suprême accent de désespoir ; puis, par un mouvement que je ne puis vous rendre, elle arracha son bouquet par moitiés : elle