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l’homme à l’hispano

profitait de sa liberté pour offrir une sauterie à quelques sauteuses. J’insistai, l’affaire dont j’étais chargé étant d’importance. À la fin on m’introduisit et je vis un spectacle étrange : Oswill, absolument seul dans un fumoir, était accroupi ou perché, je ne sais trop, devant un jazz et lui-même il s’environnait, sans broncher, de vacarmes assourdissants. De sa jambe droite, il pédalait et faisait gronder la grosse caisse ; de ses deux mains, il frappait à la fois un tambour, agitait des grelots et faisait mugir un clakson. Il était en smoking et fumait une pipe brillante. J’essayai vainement de l’entretenir. Pour m’obliger à me taire, il redoubla sa gymnastique. À la fin, sans s’interrompre, il cria que sa femme l’avait ennuyé pendant des années en jouant du Bach sur un piano et que, heureusement, c’était son tour de se divertir avec un jazz. Il paraissait tout à fait calme et satisfait.

— C’est un fou, s’exclama M. de Saint-Brémond.

— Il n’est plus périlleux que pour moi, conclut Pascaline en riant.


Ce qui se disait dans ce déjeuner, on l’eût entendu le même jour, aux termes près et moins l’anecdote du jazz, chez Mme de Joze, à Billières, chez le banquier Chillet, au cercle du vieux Baragnas et dans vingt maisons de Bayonne.

On l’eût même entendu dans un endroit plus populaire, près des halles de Pau, au restaurant Supervie. Nicolaï, le garde, chaque fois qu’il