Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1864.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
110
LIVRE II. LA FAMILLE.

dans les mains du mari. Elle ne reprenait même pas sa dot en devenant veuve[1].

Le fils était dans les mêmes conditions que la femme : il ne possédait rien. Aucune donation faite par lui n’était valable, par la raison qu’il n’avait rien à lui. Il ne pouvait rien acquérir ; les fruits de son travail, les bénéfices de son commerce étaient pour le père. Si un testament était fait en sa faveur par un étranger, c’était son père et non pas lui qui recevait le legs. Par là s’explique le texte du droit romain qui interdit tout contrat de vente entre le père et le fils. Si le père eût vendu au fils, il se fût vendu à lui-même, puisque le fils n’acquérait que pour le père[2].

On voit dans le droit romain et l’on trouve aussi dans les lois d’Athènes que le père pouvait vendre son fils[3]. C’est que le père pouvait disposer de toute la propriété qui était dans la famille, et que le fils lui-même pouvait être envisagé comme une propriété, puisque ses bras et son travail étaient une source de revenu. Le père pouvait donc à son choix garder pour lui cet instrument de travail ou le céder à un autre. Le céder, c’était ce qu’on appelait vendre le fils. Les textes que nous avons du droit romain ne nous renseignent pas clairement sur la nature de ce contrat de vente et sur les réserves qui pouvaient y être contenues. Il paraît certain que le fils ainsi vendu ne devenait pas l’esclave de l’acheteur. Ce n’était pas sa liberté qu’on vendait, mais seulement son travail. Même dans cet état, le fils restait encore soumis à la

  1. Gaius, II, 98. Toutes ces règles du droit primitif furent modifiées par le droit prétorien.
  2. Cic., De legib., II, 20. Gaius, II, 87. Digeste, XVIII, 1, 2.
  3. Plutarque, Solon, 13. Denys d’Halic., II, 26. Gaius, I, 117 ; I, 132 ; IV, 79. Ulpien, X, 1. Tite-Live, XLI, 8. Festus, vo deminutus. Code, VIII, 47, 10.