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LIVRE III. LA CITÉ.

avait de même son chef religieux, que les Athéniens appelaient le roi de la tribu. La religion de la cité devait avoir aussi son prêtre suprême.

Ce prêtre du foyer public portait le nom de roi. Quelquefois on lui donnait d’autres titres ; comme il était, avant tout, prêtre du prytanée, les Grecs l’appelaient volontiers prytane ; quelquefois encore ils l’appelaient archonte. Sous ces noms divers, roi, prytane, archonte, nous devons voir un personnage qui est surtout le chef du culte ; il entretient le foyer, il fait le sacrifice et prononce la prière, il préside aux repas religieux.

Il importe de prouver que les anciens rois de l’Italie et de la Grèce étaient des prêtres. On lit dans Aristote : « Le soin des sacrifices publics de la cité appartient, suivant la coutume religieuse, non à des prêtres spéciaux, mais à ces hommes qui tiennent leur dignité du foyer, et que l’on appelle ici rois, là prytanes, ailleurs archontes[1]. » Ainsi parle Aristote, l’homme qui a le mieux connu les constitutions des cités grecques. Ce passage si précis prouve d’abord que les trois mots, roi, prytane, archonte, ont été longtemps synonymes ; cela est si vrai qu’un ancien historien, Charon de Lampsaque, écrivant un livre sur les rois de Lacédémone, l’intitula Archontes et prytanes des Lacédémoniens[2]. Il prouve encore que le personnage que l’on appelait indifféremment de l’un de ces trois noms, peut-être de tous les trois à la fois, était le prêtre de la cité, et que le culte du foyer public était la source de sa dignité et de sa puissance.

Ce caractère sacerdotal de la royauté primitive est clairement indiqué par les écrivains anciens. Dans Es-

  1. Aristote, Polit., VII, 5, 11 (VI, 8). Comparez Denys, II, 65.
  2. Suidas, vo Χάρων.