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Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1864.djvu/235

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CH. IX. LE ROI.

ne perdît les bonnes grâces de la divinité. « Tous les neuf ans, dit Plutarque[1], les éphores choisissent une nuit très-claire, mais sans lune, et ils s’asseyent en silence, les yeux fixés vers le ciel. Voient-ils une étoile traverser d’un côté du ciel à l’autre, cela leur indique que leurs rois sont coupables de quelque faute envers les dieux. Ils les suspendent alors de la royauté, jusqu’à ce qu’un oracle venu de Delphes les relève de leur déchéance. »

2o Autorité politique du roi.

De même que dans la famille l’autorité était inhérente au sacerdoce et que le père, à titre de chef du culte domestique, était en même temps juge et maître, de même le grand-prêtre de la cité en fut aussi le chef politique. L’autel, suivant l’expression d’Aristote, lui conféra la dignité et la puissance. Cette confusion du sacerdoce et du pouvoir n’a rien qui doive surprendre. On la trouve à l’origine de presque toutes les sociétés, soit que dans l’enfance des peuples il n’y ait que la religion qui puisse obtenir d’eux l’obéissance, soit que notre nature éprouve le besoin de ne se soumettre jamais à d’autre empire qu’à celui d’une idée morale.

Nous avons dit combien la religion de la cité se mêlait à toutes choses. L’homme se sentait à tout moment dépendre de ses dieux et par conséquent de ce prêtre qui était placé entre eux et lui. C’était ce prêtre qui veillait sur le feu sacré ; c’était, comme dit Pindare, son culte de chaque jour qui sauvait chaque jour la cité[2]. C’était lui qui connaissait les formules de prière auxquelles les dieux ne résistaient pas ; au moment du combat, c’était

  1. Plutarque, Agis, 11.
  2. Pindare, Ném., XI, 5.