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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

naturellement ce titre parce qu’ils étaient les chefs des gentes. En même temps que ces hommes réunis représentaient la cité, chacun d’eux restait maître absolu dans sa gens, qui était comme son petit royaume. On voit aussi dès les commencements de Rome une autre assemblée plus nombreuse, celle des curies ; mais elle diffère assez peu de celle des patres. Ce sont encore eux qui forment l’élément principal de cette assemblée ; seulement, chaque pater s’y montre entouré de sa famille ; ses parents, ses clients même lui font cortége et marquent sa puissance. Chaque famille n’a d’ailleurs dans ces comices qu’un seul suffrage. On peut bien admettre que le chef consulte ses parents et même ses clients, mais il est clair que c’est lui qui vote. La loi défend d’ailleurs au client d’être d’un autre avis que son patron[1]. Si les clients sont rattachés à la cité, ce n’est que par l’intermédiaire et par la faveur de leurs chefs patriciens. Ils participent au culte public, ils paraissent devant le tribunal, ils entrent dans l’assemblée, mais c’est à la suite de leurs patrons.

Il ne faut pas se représenter la cité de ces anciens âges comme une agglomération d’hommes vivant pêle-mêle dans l’enceinte des mêmes murailles. La ville n’est guère, dans les premiers temps, un lieu d’habitation ; elle est le sanctuaire où sont les dieux de la communauté ; elle est la forteresse qui les défend et que leur présence sanctifie ; elle est le centre de l’association, la résidence du roi et des prêtres, le lieu où se rend la justice ; mais les hommes n’y vivent pas. Pendant plusieurs générations encore, les hommes continuent à vivre hors de la ville,

  1. Aulu-Gelle, XV, 27.