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LIVRE IV. LES RÉVOLUTIONS.

rendaient la justice en matière civile, tandis que le Sénat jugeait les affaires criminelles. Les éphores, sur l’avis du Sénat, déclaraient la guerre ou réglaient les clauses des traités de paix. En temps de guerre, deux éphores accompagnaient le roi, le surveillaient ; c’étaient eux qui fixaient le plan de campagne et commandaient toutes les opérations[1]. Que restait-il donc aux rois, si on leur ôtait la justice, les relations extérieures, les opérations militaires ? Il leur restait le sacerdoce. Hérodote décrit leurs prérogatives : « Si la cité fait un sacrifice, ils ont la première place au repas sacré ; on les sert les premiers et on leur donne double portion. Ils font aussi les premiers la libation, et la peau des victimes leur appartient. On leur donne à chacun, deux fois par mois, une victime qu’ils immolent à Apollon[2]. » « Les rois, dit Xénophon, accomplissent les sacrifices publics et ils ont la meilleure part des victimes. » S’ils ne jugent ni en matière civile ni en matière criminelle, on leur réserve du moins le jugement dans toutes les affaires qui concernent la religion. En cas de guerre, un des deux rois marche toujours à la tête des troupes, faisant chaque jour les sacrifices et consultant les présages. En présence de l’ennemi, il immole des victimes, et quand les signes sont favorables, il donne le signal de la bataille. Dans le combat il est entouré de devins qui lui indiquent la volonté des dieux, et de joueurs de flûte qui font entendre les

  1. Thucydide, V, 63. Hellanicus, II, 4. Xénophon, Gouv. de Lacéd., 14 (13). Helléniques, VI, 4. Plutarque, Agésilas, 10, 17, 23, 28 ; Lysandre, 23. Le roi avait si peu, de son droit, la direction des opérations militaires qu’il fallut une décision toute spéciale du Sénat pour confier le commandement de l’armée à Agésilas, lequel réunit ainsi, par exception, les attributions de roi et celle de général ; Plutarque, Agés., 6 ; Lys., 23. Il en avait de même pour Pausanias : Thucydide, I, 128.
  2. Hérodote, II, 56, 57.