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CH. VIII. CHANGEMENTS DANS LE DROIT PRIVÉ.

pas encore ; ils n’héritent pas entre eux ; la mère ne succède pas au fils, ni le fils à la mère[1].

Elle conserve à l’émancipation et à l’adoption le caractère et les effets que ces deux actes avaient dans le droit antique. Le fils émancipé n’a plus part au culte de la famille, et il suit de là qu’il n’a plus droit à la succession.

Voici maintenant les points sur lesquels cette législation s’écarte du droit primitif :

Elle admet formellement que le patrimoine peut être partagé entre les frères, puisqu’elle accorde l’actio familiæ erciscundæ[2].

Elle prononce que le père ne pourra pas disposer plus de trois fois de la personne de son fils, et qu’après trois ventes le fils sera libre[3]. C’est ici la première atteinte que le droit romain ait portée à l’autorité paternelle.

Un autre changement plus grave fut celui qui donna à l’homme le pouvoir de tester. Auparavant, le fils était héritier sien et nécessaire ; à défaut de fils, le plus proche agnat héritait ; à défaut d’agnats, les biens retournaient à la gens, en souvenir du temps où la gens encore indivise était l’unique propriétaire du domaine, qu’on avait partagé depuis. Les Douze-Tables laissent de côté ces principes vieillis ; elles considèrent la propriété comme appartenant, non plus à la gens, mais à l’individu ; elles reconnaissent donc à l’homme le droit de disposer de ses biens par testament.

Ce n’est pas que dans le droit primitif le testament fût tout à fait inconnu. L’homme pouvait déjà se choisir un légataire en dehors de la gens, mais à la condition de

  1. Gaius, III, 17 ; III, 24. Ulpien, XVI, 4. Cic., De invent., II, 50.
  2. Gaius, III, 19.
  3. Digeste, X, 2, 1.