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CH. XI. RÈGLES DU GOUVERNEMENT DÉMOCRATIQUE.

il n’agit qu’autant qu’il est convaincu ou qu’il croit l’être. Pour mettre en branle le suffrage universel, il faut la parole ; l’éloquence est le ressort du gouvernement démocratique. Aussi les orateurs prennent-ils de bonne heure le titre de démagogues, c’est-à-dire de conducteurs de la cité ; ce sont eux en effet qui la font agir et qui déterminent toutes ses résolutions.

On avait prévu le cas où un orateur ferait une proposition contraire aux lois existantes. Athènes avait des magistrats spéciaux, qu’elle appelait les gardiens des lois. Au nombre de sept, ils surveillaient l’assemblée, assis sur des siéges élevés, et semblaient représenter la loi, qui est au-dessus du peuple même. S’ils voyaient qu’une loi était attaquée, ils arrêtaient l’orateur au milieu de son discours et ordonnaient la dissolution immédiate de l’assemblée. Le peuple se séparait, sans avoir le droit d’aller aux suffrages[1].

Il y avait une loi, peu applicable à la vérité, qui punissait tout orateur convaincu d’avoir donné un mauvais conseil au peuple. Il y en avait une autre qui interdisait l’accès de la tribune à tout orateur qui avait conseillé trois fois des résolutions contraires aux lois existantes[2].

Athènes savait très-bien que la démocratie ne peut se soutenir que par le respect des lois. Le soin de rechercher les changements qu’il pouvait être utile d’apporter dans la législation, appartenait spécialement aux thesmothètes. Leurs propositions étaient présentées au Sénat, qui avait le droit de les rejeter, mais non pas de les convertir en lois. En cas d’approbation, le Sénat convoquait l’assemblée et lui faisait part du projet des thesmo-

  1. Pollux, VIII, 94. Philochore, Fragm., coll. Didot, p. 407.
  2. Athénée, X, 73. Pollux, VIII, 52.