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LIVRE V. LE RÉGIME MUNICIPAL DISPARAÎT.

joignaient à leur nom un surnom qui rappelait leur origine étrangère ; il y avait ainsi les Sulpicius Camerinus, les Cominius Auruncus, les Sicinius Sabinus, les Claudius Regillensis, les Aquillius Tuscus. La famille Nautia était troyenne ; les Aurélius étaient Sabins ; les Cæcilius venaient de Préneste ; les Octaviens étaient originaires de Vélitres.

L’effet de ce mélange des populations les plus diverses était que Rome avait des liens d’origine avec tous les peuples qu’elle connaissait. Elle pouvait se dire latine avec les Latins, sabine avec les Sabins, étrusque avec les Étrusques, et grecque avec les Grecs.

Son culte national était aussi un assemblage de plusieurs cultes infiniment divers, dont chacun la rattachait à l’un de ces peuples. Elle avait les cultes grecs d’Évandre et d’Hercule ; elle se vantait de posséder le palladium troyen. Ses pénates étaient dans la ville latine de Lavinium ; elle adopta dès l’origine le culte sabin du dieu Consus. Un autre dieu sabin, Quirinus, s’implanta si fortement chez elle qu’elle l’associa à Romulus, son fondateur. Elle avait aussi les dieux des Étrusques, et leurs fêtes, et leur augurat, et jusqu’à leurs insignes sacerdotaux.

Dans un temps où nul n’avait le droit d’assister aux fêtes religieuses d’une nation, s’il n’appartenait à cette nation par la naissance, le Romain avait cet avantage incomparable de pouvoir prendre part aux féries latines, aux fêtes sabines, aux fêtes étrusques, et aux jeux olympiques[1]. Or la religion était un lien puissant. Quand deux villes avaient un culte commun, elles se disaient

  1. Pausanias, V, 23, 24. Comp. Tite-Live, XXIX, 12 ; XXXVII, 37.