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LIVRE V. LE RÉGIME MUNICIPAL DISPARAÎT.

CHAPITRE III.

LE CHRISTIANISME CHANGE LES CONDITIONS DU GOUVERNEMENT.

La victoire du christianisme marque la fin de la société antique. Ce n’est qu’avec la religion nouvelle que s’achève cette transformation sociale que nous avons vue commencer six ou sept siècles avant notre ère.

Pour savoir combien le christianisme a changé les règles de la politique, il suffit de se rappeler que l’ancienne société avait été constituée par une vieille religion dont le principal dogme était que chaque dieu protégeait exclusivement une famille ou une cité, et n’existait que pour elle. C’était le temps des dieux domestiques et des divinités poliades. Cette religion avait enfanté le droit ; les relations entre les hommes, la propriété, l’héritage, la procédure, tout s’était trouvé réglé, non par les principes de l’équité naturelle, mais par les dogmes de cette religion et en vue des besoins de son culte. C’était elle aussi qui avait établi un gouvernement parmi les hommes : celui du père dans la famille, celui du roi ou du magistrat dans la cité. Tout était venu de la religion, c’est-à-dire de l’opinion que l’homme se faisait de la divinité. Religion, droit, gouvernement s’étaient confondus et n’avaient été qu’une même chose sous trois aspects divers.

Nous avons cherché à mettre en lumière ce régime social des anciens, où la religion était maîtresse absolue dans la vie privée et dans la vie publique ; où l’État était une communauté religieuse, le roi un pontife, le magistrat un prêtre, la loi une formule sainte ; où le patriotisme était de la piété, l’exil une excommunication ; où