Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/395

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qui remplaçait une autre classe au pouvoir. C’étaient les vieux principes qui étaient mis de côté, et des règles nouvelles qui allaient gouverner les sociétés humaines.

Il est vrai que la cité conserva les formes extérieures qu’elle avait eues dans l’époque précédente. Le régime républicain subsista ; les magistrats gardèrent presque partout leurs anciens noms ; Athènes eut encore ses archontes et Rome ses consuls. Rien ne fut changé non plus aux cérémonies de la religion publique ; les repas du prytanée, les sacrifices au commencement de l’assemblée, les auspices et les prières, tout cela fut conservé. Il est assez ordinaire à l’homme, lorsqu’il rejette de vieilles institutions, de vouloir en garder au moins les dehors.

Au fond, tout était changé. Ni les institutions, ni le droit, ni les croyances, ni les mœurs ne furent dans cette nouvelle période ce qu’ils avaient été dans la précédente. L’ancien régime disparut, entraînant avec lui les règles rigoureuses qu’il avait établies en toutes choses ; un régime nouveau fut fondé, et la vie humaine changea de face.

La religion avait été pendant de longs siècles l’unique principe de gouvernement. Il fallait trouver un autre principe qui fût capable de la remplacer et qui pût, comme elle, régir les sociétés en les mettant autant que possible à l’abri des fluctuations et des conflits. Le principe sur lequel le gouvernement des cités se fonda désormais, fut l’intérêt public.

Il faut observer ce dogme nouveau qui fit alors son apparition dans l’esprit des hommes et dans l’histoire. Auparavant, la règle supérieure d’où dérivait l’ordre social, n’était pas l’intérêt, c’était la religion. Le devoir d’accomplir les rites du culte avait été le lien social. De cette nécessité religieuse avait découlé, pour les uns le droit de commander, pour les autres l’obligation d’obéir ; de là étaient venues les règles de la justice et de la procédure, celles