Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/58

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1° La jeune fille quitte le foyer paternel. Comme elle n’est pas attachée à ce foyer par son propre droit, mais seulement par l’intermédiaire du père de famille, il n’y a que l’autorité du père qui puise l’en détacher. La tradition est donc une formalité indispensable.

2° La jeune fille est conduite à la maison de l’époux. Comme en Grèce, elle est voilée, elle porte une couronne, et un flambeau nuptial précède le cortège. On chante autour d’elle un ancien hymne religieux. Les paroles de cet hymne changèrent sans doute avec le temps, s’accommodant aux variations des croyances ou à celles du, langage ; mais le refrain sacramentel subsista toujours sans pouvoir être altéré : c’était le mot Talassie, mot dont les Romains du temps d’Horace ne comprenaient pas mieux le sens que les Grecs ne comprenaient le mot ύμέναιε, et qui était probablement le reste sacré et inviolable d’une antique formule.

Le cortège s’arrête devant la maison du mari. Là, on présente à la jeune fille le feu et l’eau. Le feu, c’est l’emblème de la divinité domestique ; l’eau, c’est l’eau lustrale, qui sert à la famille pour tous les actes religieux. Pour que la jeune fille entre dans la maison, il faut, comme en Grèce, simuler l’enlèvement. L’époux doit la soulever dans ses bras, et la porter par-dessus le seuil sans que ses pieds le touchent.

3° L’épouse est conduite alors devant le foyer, là où sont les Pénates, où tous les dieux domestiques et les images des ancêtres sont groupés autour du feu sacré. Les deux époux, comme en Grèce, font

    558. Plutarque, Quest. rom., 1 et 29 ; Romulus, 15. Pline, H. N., XVIII, 3. Tacite, Annales, IV, 16 ; XI, 27. Juvénal, Sat., X. 329-336. Gaius, Inst., I, 112. Ulpien, IX. Digeste, XXIII, 2, 1. Festus, v. rapi. Macrobe, Sat., I, 15. Servius, ad Æneid., IV, 168. — Mêmes usages chez les Étrusques, Varron, De re rust., II, 4. — Mêmes usages chez les anciens Hindous, Lois de Manou, III, 27-30, 172 ; V, 152 ; VIII, 227 ; IX, 194. Mitakchara, trad. Orianne, p. 166, 167, 236.