Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/30

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

22 LIVRE I. ANTIQUES CROYANCES.

famille devait éteindre son feu sacré et en rallumer un autre aussitôt*. Mais pour se procurer le feu nouveau, il y avait des rites qu'il fallait scrupuleusement observer. On devait surtout se garder de se servir d'un caillou et de le frapper avec le fer. Les seuls procédés qui fussent permis étaient de concentrer sur un point la chaleur des rayons solaires ou de frotter rapi- dement deux morceaux de bois d'une espèce déterminée et d'en faire sortir l'étincelle*. Ces différentes règles prouvent assez que, dans l'opinion des anciens, il ne s'agissait pas seulement de produire ou de conserver un élément utile et agréable ; ces hommes voyaient autre chose dans le feu qui brûlait sur leurs autels.

Ce feu était quelque chose de divin ; on l'adorait, on lui ren- dait un véritable culte. On lui donnait en offrande tout ce qu'on croyait pouvoir être agréable à un dieu, des fleurs, des fruits, de l'encens, du vin*. On réclamait sa protection-, on le croyait puissant. On lui adressait de ferventes prières pour obtenir de lui ces éternels objets des désirs humains, santé, richesse, bonheur. Une de ces prières qui nous a été conservée dans le recueil des hymnes orphiques, est conçue ainsi: « Rends-nous toujours florissants, toujours heureux, ô foyer; ô toi qui es éternel, beau, toujours jeune, toi qui nour- ris, toi qui es riche, reçois de bon cœur nos offrandes, et donne- nous en retour le bonheur et la santé qui est si-douce*.» Ainsi on voyait dans le foyer un dieu bienfaisant qui entretenait la vie de l'homme, un dieu riche qui le nourrissait de ses dons, un dieu fort qui protégeait la maison et la famille. En présence d'un danger on cherchait un refuge auprès de lui. Quand le palais de Priam est envahi, Hécube entraîne le vieux roi près du foyer: «Tes armes ne sauraient te défendre, lui dit-elle*, mais cet autel nous protégera tous*. »

l. Macrobe, Saturn., I, 12.

t. PlTilarque, Numa, 9; Festns, éd. Muller, p. 100.

3. Ovide, A. A., I, 637 : dentur in antiquos thura merumque focoa. Plaute, tHv., II, 39-40; Mercalor, V, 1, 5. Tibulle, 1, 3. 34. Horace, Odes, XXIII, 2, -4. Galon, De re rust., 143. Piaule, Aulaire, prologue. k. Hymnes orph., 84. à. Virfile, En., II. &33. Horace, ÉpU.. I. S. Ovide. Triêt., IV, I, 33.

�� �