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Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1920.djvu/419

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CHAP. XIII. RÉVOLUTIONS DE SPARTE. 411

domaines par des esclaves. D'une part étaient quelques hommes qui avaient tout, de l'autre le très-grand nombre qui n'avait absolument rien. Plutârque nous présente, dans la vie d'Agis et dans celle de Gléomène, un tableau de la société Spartiate; on y voit un amour effréné de la richesse, tout mis au-dessous d'elle ; chez quelques-uns le luxe, la mollesse, le désir d'aug- menter sans fin leur fortune ; hors de là, rien qu'une tourbe misérable, indigente, sans droits politiques, sans aucune va- leur dans la cité, envieuse, haineuse, et qu'un tel état social condamnait à désirer une* révolution.

Quand l'oligarchie eut ainsi poussé les choses aux dernières limites du possible, il fallut bien que la révolution s'accomplît, et que la démocratie, arrêtée et contenue si longtemps, brisât à la fin ses digues. On devine bien aussi qu'après une si longue compression la démocratie ne devait pas s'arrêter à des réformes politiques, mais qu'elle devait arriver du pre- mier coup aux réformes sociales.

Le petit nombre des Spartiates de naissance (ils n'étaient plus, en y comprenant toutes les classes diverses, que sept cents), et l'affaissement des caractères, suite d'une longue op- pression, furent cause que le signal des changements ne vint pas des classes inférieures. Il vint d'un roi. Agis essaya d'ac- complir cette inévitable révolution par des moyens légaux : ce qui augmenta pour lui les difficultés de l'entreprise. Il pré- senta au Sénat, c'est-à-dire aux riches eux-mêmes, deux pro- jets de loi pour l'abolition des dettes et le partage des terres. 11 n'y a pas lieu d'être trop surpris que le Sénat n'ait pas rejeté ces propositions; Agis avait peut-être pris ses mesures pour qu'elles fussent acceptées. Mais, les lois une fois votées, il restait à les mettre à exécution ; or les réformes de cette nature sont toujours tellement difficiles à accomplir que les plus hardis y échouent. Agis, arrêté court parla résistance des épliores, fut contraint de sortir de la légalité : il déposa ces magistrats et en nomma d'autres de sa propre autorité; puis il arma ses partisans et établit, durant une année, un régime de terreur. Pendant ce temps-ià il put appliquer la loi sur les dettes et faire brûler tous les titres de créance sur

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