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CHAP. VI. LE DROIT DE PROPRIÉTÉ. 71

Sur cette ligne, de distance en distance, rhommô plaçait quelques grosses pierres ou quelques troncs d'arbres, que l'on appelait des tei^mes. On peut juger ce que c'était que ces bor- nes et quelles idées s'y attachaient par la manière dont la piété des hommes les posait en terre. « Voici, dit Siculus Flac- ons, ce que nos ancêtres pratiquaient; ils commençaient par creuser une petite fosse et, dressant le Terme sur le bord, ils le couronnaient de guirlandes d'herbes et de fleurs. Puis ils offraient un sacrifice; la victime immolée, ils en faisaient cou- ler le sang dans la fosse; ils y jetaient des charbons allumés (allumés probablement au feu sacré du foyer), des grains, des gâteaux, des fruits, un peu de vin et de miel. Quand tout cela s'était consumé dans la fosse, sur les cendres encore chaudes on enfonçait la pierre ou le morceau de bois »*. On voit clai- rement que cette cérémonie avait pour objet de faire du Terme une sorte de représentant sacré du culte dcmestique. Pour lui continuer ce caractère, chaque année on renouvelait sur lui l'acte sacré, en versant des libations et en récitant des prières. Le Terme posé en terre, c'était donc, en quelque sorte, la reli- gion domestique implantée dans le sol, pour marquer que ce sol était à jamais la propriété de la famille. Plus tard, la poé- sie aidant, le Terme fut considéré comme un dieu distinct et personnel.

L'usage des Termes ou bornes sacrées des champs paraît avoir été universel dans la race indo-européenne. Il existait chez les Hindous dans une haute antiquité, et les cérémonies sacrées du bornage avaient chez eux une grande analogie avec celles que Siculus Flaccus a décrites pour l'Italie*. Avant Rome, ■ nous trouvons le Terme chez les Sabins"; nous le trouvons encore chez les Étrusques. Les Hellènes avaient aussi des bor- nes sacrées qu'ils appelaient ôpoi, 8eol ôpio»*.

��1. Siculus Flaccus, De conditione agrorum, édit Lacbmann, p. I4i, édit. Goei,

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2. Loi» de Uanou, VIO, 245. Vrihaspali, cité par Sicé, Ligiilat. Mndoxt

3. Varron, L. L-, V, 74.

4. PoUux, IX, 9. Hesychij» ôfoç Platon Loi», VIII, p. 842. Plutarqne et Denya

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