Page:Géhin - Gérardmer à travers les âges.djvu/156

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si intéressant que nous n’avons pu résister au désir de le citer au moins partiellement, car il montre, sous une forme polie, l’énergie toute vosgienne avec laquelle les montagnards savaient au besoin défendre leurs intérêts.

L’Assemblée municipale… estime qu’il est de l’intérêt de la communauté de s’opposer à cette vente, parce que les habitants de la dite communauté ont le droit incontestable d’avoir dans les forêts dont s’agit les bois nécessaires, soit pour chauffage, maronnage, bâtiments, fontaines, clôtures d’héritages et autres ; ils ont également le droit d’y envoyer leurs bestiaux pour pâturer.

Après avoir rappelé les titres qui confirment leurs droits d’usage, l’Assemblée ajoute :

Il n’y a aucun doute que la communauté ne soit fondée à s’élever contre une vente aussi désastreuse. Les réclamations sont d’autant plus puissantes que cette vente parait être faite contre le règlement des Eaux et Forêts : par ce règlement il ne doit se faire aucune coupe ny ventes extraordinaires sans les ordres express du souverain. Or il ne parait pas qu’un arrêt du Conseil ait autorisé la vente considérable dont s’agit. Elle a donc été faite contre la loi, elle est donc nulle.

Ce moyen de nullité acquerra la plus grande force s’il est prouvé que l’intérêt public soit sacrifié ; or, nous posons en fait que nos forêts, depuis l’établissement des scieries, sont tellement dégradées que Messieurs les Officiers de la Maitrise peuvent à peine délivrer les bois de soumission qu’on leur demande, et que déjà ils ont été obligés de supprimer des scieries.

Si cette vente avait lieu, que deviendraient donc les habitants de Gérardmer. Cette communauté composée de plus de 5.000 âmes[1], n’a aucune espèce de ressources que dans le bétail et dans le commerce, soit en vaisselle de bois, soit en sabots. Ne pouvant plus suivre leur commerce, forcés de vendre leur bétail, et notamment ceux qui ont affermé les Chaumes de Bebriette, Balveurche, le Haut et Bas-Chitelet, qui ont droit de parcours dans les forêts dont s’agit, ils seraient donc dans la dure nécessité de même qu’un

  1. La statistique de 1780 n’accuse que 4.062 âmes.