Page:Géraldy - Les Petites Âmes, 1908.djvu/19

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Parce qu’il est très vieux et ne voyage pas…
Ils revoient, délicate, ombreuse et nuancée,
une petite vieille Europe, où des toits gris
sommeillent sous le geste en vieil or des évêques…
une Europe de pierre, aux arbres rabougris,
les villes, leurs vieillards et leurs bibliothèques,
les routes cheminant à travers les champs noirs
et qui s’en vont, toutes seules, pendant des lieues…
les vergers, les escarpolettes, les banlieues,
les échelles dans les pruniers… et puis les soirs,
les brouillards et le froid, la pluie aux vitres closes,
les automnes, les crépuscules… tant de choses
qu’ils vécurent sous les lampes, auprès du feu !…
les saisons et les cris différents des marchandes,
les matins de marchés où des paysans bleus
sur des linges légers qui sentent la lavande
mettent des pains de beurre auprès des paniers d’œufs…
l’Europe lasse, avec ses Avrils qui s’éveillent
à la voix des prairies bourdonnantes d’abeilles !…
les villas et les jeunes filles, les jardins
pleins de muguets, de résédas et de jasmins !…
l’Europe harmonieuse, aux teintes d’aquarelle,