Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/123

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la ville de Strasbourg, en 1496, par les Zeissolff d’Adelsheim, sous la condition qu’elle ne pourrait jamais être concédée qu’à un noble. Les échevins de Wasselonne y avaient droit à trois repas (Imbisse) par an, et si le seigneur se refusait à en faire la prestation, l’obéissance pouvait et devait lui être refusée. Le hofmeister ou régisseur qui résidait sur ce domaine était tenu d’égayer ces repas par de la musique qu’exécutaient deux joueurs d’instruments (Pfeifer). Au nombre des plats réglementaires du dîner figurait une épaisse purée de pois (Erbsenmuss) flanquée de lard. Mais ce mets, qui avait une signification symbolique, ne pouvait pas être servi dans une forme arbitraire ou banale ; il devait l’être dans un rite déterminé. La purée était apportée dans de vastes écuelles ou terrines surmontées et bardées chacune d’un morceau de lard réjouissant ; si la viande, grâce à sa vigueur et à la noblesse de son port, n’était point profanée par le contact de la purée, la cérémonie était régulière ; si, au contraire, la faiblesse de sa constitution l’avait fait fléchir et plonger dans la purée, le hofmeister était passible d’une amende de 32 florins au profit des hommes de la colonge[1].

Les habitants des villes avaient aussi leurs bonnes fortunes gastronomiques, à l’occasion des passages de princes, des couronnements d’empereurs, des tirs publics, des victoires nationales et autres événements de conséquence, comme nous le verrons. Cependant, je signalerai dès à présent la frairie donnée au peuple de Bâle, en 1519. Après la bataille de Marignan, les cantons suisses organisèrent à Uri, une Kilwy avec tir d’adresse. La ville de Bâle y envoya 60 arquebusiers qui revinrent avec quatre bœufs gras, trophée vivant conquis par leur habileté. Le sénat de Bâle les répartit parmi les tribus et y ajouta du gibier et du vin. Un festin immense, auquel prit part toute la commune, hommes et femmes, eut lieu le jour de la Saint-Michel, et ce festin fut suivi

  1. Helmer, Notizen über Wasslenheim und Molsheim. 1851. In-8°, p. 70.