Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/130

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de la seigneurie s’étaient exécutés avec une semblable générosité, la jeune fille avait fait très-honnêtement son entrée dans ce monde. De nouvelles recherches me permettent d’ajouter que partout la loyauté des sujets fut à la hauteur de l’événement. Wihr contribua avec 50 poulets, 130 truites, 2 coqs de bruyère, 41 gelinottes et 1 chevreuil ; le val d’Orbey avec des poules, du beurre, un chevreuil, du petit gibier, 204 truites et 1,140 œufs ; Guémar, Jebsheim et Thannenkirch avec de la volaille, du beurre, des œufs, etc. ; Illhaeusern et Mussig avec des poissons et des écrevisses ; le major de Berstett avec 6 oies et 16 dindonneaux ; le baron de Dutlingen avec 7 dindons ; le syndic de la ville de Colmar avec 10 oranges, etc. — Les fêtes du baptême, qui durèrent dix jours, réunirent à table 202 personnes ; on y but 63 mesures de vin. Parmi les étrangers de distinction qui y assistèrent, on comptait des princes et des princesses de Wurtemberg, le comte de Lamarck, le comte de Linange, la comtesse Sophie-Juliana, femme du Wildgraf du Rhin, et une Française, Mme de Châtillon[1]. La jeune fille, objet de tant d’honneurs, était Catherine-Agathe qui devint la femme du palatin Christian de Birkenfeld, le protégé de Louis XIV.

Le sentiment de l’ancienne hospitalité alsacienne était si vif qu’il ne cédait pas même devant l’impossibilité où elle était parfois de se manifester dans toute sa liberté. Le duc de la Meilleraye se trouvait de passage à Mulhouse, en 1661, avec sa jeune femme, la belle et célèbre Hortense Mancini. Le Magistrat insista pour le traiter dignement. Mais le duc était pressé d’aller plus loin. Néanmoins, le jeune couple ne put se soustraire à une collation qu’on lui servit à brûle-pourpoint dans l’hôtel de ville et où figurèrent des confitures recherchées, des pâtisseries, des fruits de toute espèce et du schnipps[2].

Les gens pressés sont malaisés à régaler. Pour en voir de bien

  1. Archives du Haut-Rhin. Fonds de Ribeaupierre.
  2. Mieg, Gesch. der Stadt Mülhausen, t. Ier, p. 251.